Bonjour,
Pour l'anecdote, voici la transcription, la traduction et la reproduction d'un extrait
d'une charte en occitan de 1489 peu connue, fixant les limites, confrontations, droits
et usages de la seigneurie du lordadais:
Art. 26
Item mes dissenen lodits prohomes que en
ladict montanha de taba a un estanh
propri deldict noble que ez fort pregon
en loqual negun no pot pescar sino que
am la verga ou am balesta ou am
coustel es tout autrement quant y pescan
lodict noble et sos hereties poden penhoran
los pescadors atal o an auzit dire a lors
predessessores et mes lodict peyro luziera
dict que un Jour bea xviii ans
ou a lenviron el et bernad guilhamat eran
et se trouberen en la companha del capdet
Hugues de lordat qdam(1) filh del de noble hug
de lordat en ladict montanha de taba et
trouberen dus cappellas de ax que pescaben
et abian tendut filatz dedins lodict estanh
et lodict capdet los penhoret et lor
estremet tout lo peys que lor troubet
et apres per so que eran gens de egliza
los tournet los filatz.
En français:
Art. 26
Item. Lesdits prud'hommes(2) m'ont(3) dit que
dans la montagne de Tabe il y a un étang
propriété dudit noble(4) qui est fort profond(5)
et dans lequel personne ne peut pêcher sinon
avec la canne, ou avec l'arbalète ou avec le
couteau c'est tout; autrement quand ledit noble
et ses héritiers y pêchent ils peuvent saisir
les pêcheurs. Comme le leur ont aussi dit leurs
ancêtres et ledit Pierre Luzière(6) m'a dit,
un jour il y a dix-huit ans
ou environ, lui et Bernat Guilhamat étaient
et se trouvaient en la compagnie du cadet
Hugues de Lordat(7) fils du noble Hugues
de Lordat en ladite montagne de Tabe et
trouvèrent deux chapelains d'Ax qui pêchaient
et avaient tendu des filets dans ledit étang
et ledit cadet les saisit et leur
prit(8) tout le poisson qu'il leur trouva
et apres, parce que c'étaient des gens d'église,
leur rendit les filets.
(1) La charte de 1535 (cf. infra) donne "lodict" ici
(2) Il s'agit de Bortholy Causau home antic del loc de Lordat,
de Bernad Rauzi del loc de Vernaux, de Johanes Rauzi del loc dappy,
et de
Peyre Danglada a luziera del Urs, qui ont prêté serment
sur les quatre évangiles, et qui énumèrent les usages ancestraux.
(3) C'est le notaire recueillant la déposition orale des usages ancestraux qui
parle ici (Hélie de Marsac, notaire de la ville d'Ax en Foix).
(4) Il s'agit de Hugues de Lordat, probablement Hugues III de Lordat
(5) Ce point est le plus problématique: l'Etang des Truites n'est pas
exactement dans le territoire du lordadais, qui se terminait à la crête
sommitale Soularac-Saint-Barthélemy, à 1000m de là. Néanmoins, aucun
des étangs de la montagne de Tabe appartenant vraiment au seigneur de Lordat,
à savoir l'étang d'Appy et l'Etang Tort et autre flaques d'eau, ne peut
être qualifié de "fort profond".
L'étang des Truites était situé aux confins de la seigneurie de Mirepoix.
Le plus probable est donc que le seigneur de Lordat s'était approprié l'usage
de cet étang, étant donné que le seigneur de Mirepoix n'y mettait certainement
jamais les pieds, vu la distance.
A la rigueur il pourrait donc s'agir de l'étang d'Appy mais d'une part
cet étang n'est pas "très profond" et d'autre part j'ignore s'il était
poissonneux à cette époque, au point qu'on y vienne d'Ax, alors que l'étang
des Truites était au contraire très réputé pour sa richesse poissoneuse, d'où
son nom, d'ailleurs.
(6) probablement le prud'homme
Peyre Danglada de la Luzière d'Urs.
(7) Mentionné comme "Huguet de Lordat" dans la charte de 1535 (cf. infra).
Probablement Hugues IV de Lordat.
(8) traduction de "estremar/estremer" non trouvée.
La transcription et la traduction ne sont pas certifiées car je ne suis
pas spécialiste ni occitanniste. Voici la reproduction de l'extrait en question.
Il s'agit d'une copie sur papier exécutée en 1670 et dûment collationnée,
effectuée sans doute en vue d'un dénombrement général du Royaume ordonné par
Louis XIV et Colbert, pour la rationalisation de l'exploitation des Forêts,
puisqu'on trouve notamment la signature de Louis de Froidour parmi les collationneurs.
L'ensemble du dossier est conservé aux Archives Départementales de la Haute-Garonne.
Une autre charte datée de 1535 versée au même dossier porte à peu près le même texte
à de petites variantes près. Je trouvais cette pièce instructive pour ceux
qui s'intéressent à la pêche, aux Pyrénées et à l'Histoire.
Plus d'informations sur demande,
Cordialement.
Pierre
<<
Partagez très simplement des photos sur ce site en quelques clicks et sans avoir besoin d'utiliser un site dédié aux hébergements de vos images affichant souvent une publicité excessive! >>