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ne saisine de la cour de justice européenne assortie d'un sursis exceptionnel : la Commission européenne a accordé à la France un nouveau délai avant de la poursuivre dans l'affaire de la pollution aux nitrates des eaux bretonnes. Afin d'examiner le plan d'action présenté mi-mars par le ministère de l'environnement, le collège des commissaires a décidé de temporiser, tout en saisissant la cour de justice européenne. La Commission a cependant indiqué qu'en l'absence d'accord d'ici quelques mois, elle demanderait à la justice d'infliger à la France une amende d'au moins 28 millions d'euros, puis 117 900 euros par jour d'astreinte après un éventuel jugement définitif.

Cette décision mesurée donne une idée de l'intensité des tractations suscitées à Bruxelles par ce contentieux. En décembre, la Commission avait reporté in extremis sa décision, à la suite d'énormes pressions venues de Paris. Mais pour elle, onze captages - et non pas neuf comme l'affirment les Français - présentent encore des taux de nitrates supérieurs au 50 mg par litre requis par la législation. Afin de gagner du temps, les autorités françaises ont promis de mettre en oeuvre, d'ici à 2009, un ensemble de mesures, comme la fermeture de quatre captages en cause, ou la limitation des activités agricoles dans les zones les plus sensibles. Au grand désespoir des agriculteurs locaux, qui ont multiplié les actions de protestation ces dernières semaines.

"Les mesures présentées pas la France sont sérieuses, mais il faut les préciser et analyser leur impact potentiel, car nous ne sommes pas certains qu'elles aillent assez loin", indique un expert bruxellois. Stavros Dimas, le commissaire européen en charge de l'environnement est d'autant plus excédé que la législation en cause date de 1975. En 2001, la France avait déjà été sommée par la justice européenne de se conformer à ces normes adoptées avec le soutien de Paris. M. Dimas pourra demander à tout moment à ses collègues de mettre ses menaces à exécution si les progrès constatés en Bretagne ne sont pas suffisants.

"On se félicite que la France ait eu encore un sursis. Ce qu'on voulait, c'était créer un électrochoc pour que l'Etat prenne ses responsabilités", a déclaré à l'AFP Jean-Marie Beghin, d'Eau et Rivières de Bretagne, une organisation très active localement dans la lutte contre la pollution.
Philippe Ricard