ENVIRONNEMENT Adoptée hier en conseil des ministres
Loi sur l'eau : des objectifs ambitieux
Marielle Court
[10 mars 2005]
Le projet de loi sur l'eau présenté par Serge Lepeltier a été adopté hier en Conseil des ministres. Une nouvelle étape pour un texte attendu : la directive européenne sur l'eau fixe cet objectif aux pays membres : obtenir «un bon état écologique des eaux d'ici à 2015». Une perspective ambitieuse pour la France. «La situation n'est pas très satisfaisante, a reconnu le ministre de l'Écologie, On trouve des pesticides dans 75% des rivières et dans la moitié des nappes souterraines. Par ailleurs, la moitié du territoire est polluée par des nitrates.»
Les supporters du slogan «pollueur-payeur» seront déçus. Certes, sur les deux milliards d'euros consacrés par les six agences de l'eau à la dépollution, le monde agricole verra sa participation directe passée de 1% à 4% et les entreprises de 13 à 14%. Mais cela ne fera diminuer celle des ménages que de 86% à 82%.
Les agriculteurs payent deux taxes, l'une sur l'irrigation, l'autre sur l'élevage, qui représentent 20 millions d'euros. Le projet de loi prévoit de leur en transférer une troisième, jusqu'alors financée par les fabricants d'engrais, qui devrait rapporter 40 millions d'euros. Serge Lepeltier rappelle par ailleurs que si la loi ne prévoit aucune taxe directe sur l'utilisation des nitrates, une mesure coercitive est entrée en vigueur depuis janvier. Les agriculteurs sont sommés de suivre un cahier des charges très précis. En cas de non-respect, les aides européennes qu'ils reçoivent peuvent être amputées de 1 à 5%.
Le projet de loi prévoit également un certain nombre d'autres mesures. Les pulvérisateurs de pesticides seront ainsi soumis à un contrôle technique comme cela se pratique pour les automobiles. «On sait qu'environ 30% d'entre eux présentent un défaut majeur», assure-t-on dans l'entourage du ministre. Le texte envisage également de créer une traçabilité des produits phytosanitaires et il réorganise les procédures d'entretien des rivières. Enfin, il donne de nouveaux outils aux maires pour améliorer leur gestion des services publics de l'eau et de l'assainissement.
«L'eau, c'est la vie», s'est exclamé hier le ministre de l'Écologie, affirmant : ce projet de loi «nous permettra d'avoir des cours d'eau à la fois écologiques et vivants, riches en poisson, une eau potable moins coûteuse ainsi qu'un lien santé-environnement dans l'agriculture et dans l'industrie sans risque. Et puis nous allons pouvoir retrouver des activités de loisir telles que se baigner dans nos rivières».
Un message que seule la FNSEA (Fédération nationale des syndicats exploitants agricoles) semble avoir reçu cinq sur cinq. «C'est un projet équilibré en faveur de la reconquête de la qualité de l'eau», affirmait hier le syndicat des agriculteurs. Du côté des mouvements écologistes, la déception prédomine. «Ce projet manque cruellement d'ambition», explique l'association Eau et Rivières de Bretagne. «Cette loi ne s'attaque pas aux vraies racines du mal», renchérit Cap 21, le mouvement écologiste de Corinne Lepage, ex-ministre de l'Environnement.